Gagnon, Julien, père, patriote

Il est né sous le prénom de Lucien, à La Prairie, le 8 janvier 1793, mais son prénom le plus connu est Julien.

Il était cultivateur à Pointe à la Mule dans la paroisse de Saint-Valentin, aujourd'hui Saint-Blaise.  Il se maria une première fois à L'Acadie, le 18 septembre 1815, à Catherine Cartier (1797-1827), soeur de l'épouse de Théodore Béchard, patriote,  et du patriote Augustin Cartier.  Julien Gagnon se remaria à Napierville, le 8 septembre 1828, à Sophie Régnier, (décédée en 1887, à l'âge de 78 ans).  Gagnon avait 41 ans lors des troubles de 1837-1838.  Son implication dans le mouvement patriote fut constante et presque permanente à partir de 1835-1836; il devait donc avoir acquis une certaine aisance financière.

Il n'a jamais été fait prisonnier.  L'historien L. O. David l'immortalisa en révélant plusieurs de ses exploits historiques. 
Partout, on le retrouve avec le docteur Côté, député du comté de l'Acadie.  Tantôt, il rassemble les Patriotes de Saint-Valentin et de l'Acadie, tantôt il recrute des membres dans d'autres paroisses, tantôt il dirige des charivaris, tantôt il combat en tête de ligne. Invincible et inlassable, Gagnon se prépare, d'une main de fer, à une lutte offensive.  Il fut qualifié de "terreur du village".  Décidé de mener à bien la rébellion, il s'entoura de lieutenants convaincus et incita les gens à prendre parti.

Dès novembre 1837, il avait rassemblé, avec le docteur Côté, environ 150 hommes armés qui étaient prêts à répondre à toute tentative d'agression militaire. Il fut accusé par Dudley Flowers, lieutenant de milice à la Grande-Ligne, de l'avoir contraint à remettre sa commission par des charivaris.  Le docteur Quesnel, de l'Acadie, l'accusa aussi de charivaris.  Le 10 novembre, plusieurs hommes de Gagnon s'étaient regroupés à Pointe à la Mule et attendaient le passage de la cavalerie.  En vain.  Après l'échec de Saint-Charles, il tint un conciliabule avec plusieurs chefs en fuite vers les États-Unis; l'idée d'attaquer Saint-Jean émergea à nouveau.  Finalement, il fut décidé qu'il serait plus prudent de traverser la frontière.  Peu après, les réfugiés voulurent se porter au secours des Patriotes de Saint-Eustache en se regroupant à Saint-Césaire et en forçant l'armée à intervenir à deux endroits en même temps.  Ce qu'ils firent. Ensuite, le 6 décembre 1837, avec quelque 70 à 80 Patriotes, il prit la fuite et réussit à se rendre aux États-Unis.

Le 28 février 1838, Gagnon fait partie des 300 Patriotes qui franchissent à nouveau la frontière et se rendent à Caldwel's Manor (Noyan) où Nelson y fait la déclaration de l'indépendance du Canada.  À la fin de l'hiver, Gagnon était chargé de recruter des Frères Chasseurs. En novembre 1838, il dirigeait le camp de Napierville aux côtés de Nelson et de Côté.  Il participa à la première bataille de Lacolle, au vieux moulin. Les Patriotes y remportèrent la victoire.  Le lendemain, il était à la deuxième bataille de Lacolle, aux côté de l'officier Oklowski mais les 171 Patriotes durent retraiter devant le grand nombre d'opposants volontaires.  Bien que nous n'en soyons pas certains, il semble que Julien Gagnon participa ensuite à la bataille d'Odelltown, le 9 novembre. À la suite de la défaite, il se réfugia à Champlain, aux États-Unis.

Julien Gagnon mourut de tuberculose le 7 janvier 1842 au Corbeau, New York.  Son corps fut transporté à Saint-Valentin pour y être inhumé, dans la nef de l'église,  le 11 janvier; selon sa volonté, on le revêtit de sa tuque bleue et de son habit d'étoffe du pays.

Réal Fortin, La guerre des Patriotes le long du Richelieu, Éd. Mille Roches, 1988.